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Questions à Philippe des Pallières

Philippe des Pallières est un auteur (re)connu qui s'est lancé il y a quelques années dans l'édition. Son best-seller : Les Loups-Garous de Thiercelieux.

 

Bonjour Philippe. Peux-tu nous présenter rapidement Lui-Même ?
Lui-même, comme son nom l’indique en partie, est une micro société créée en 1998. Ses activités tournent principalement autour de la publication et de la promotion des jeux de société. C’est un projet qui me tient à cœur depuis longtemps, mais j’ai voulu bien connaître le monde du jeu avant de me lancer (j’ai tourné ma langue dans ma bouche + de 10 ans avant de faire le grand saut).

Ce n'est pas toujours facile de se lancer comme ça dans l'aventure. Quel a été le déclic ? Et quelle idée de ta future entreprise avais-tu au départ, juste avant de la créer ?
En 1996, j’ai décidé qu’à 36 ans il était temps de faire les choses qui me plaisait le plus dans la vie : auteur et développeur de jeux à la campagne.
J’ai vendu mes petites parts de la société Totem (organisatrice de festivals ludiques et propriétaire d’une petite boutiquette de jeux à Enghien-les-Bains, qui vit toujours et s’est agrandie).
Je suis parti dans un petit village de l’est sauvage (Thiercelieux, bien sûr) pour réfléchir à des nouveaux jeux et trouver le moyen de les publier dans ce presque désert qu’était à l’époque le monde de l’édition.
Certains de mes projets ne pouvaient concerner aucun des éditeurs en place et d’autre part j’avais des idées graphiques très précises que je voulais mener à terme. L’idée, parallèlement à la création de jeux, de développer un petit artisanat éditorial me tentait.
Le premier était un livre-jeu à découper pour enfant, sur le thème de l’anniversaire, illustré par un ami de toujours (depuis + de 20 ans) qui est venu me rejoindre à Thiercelieux, j’ai nommé François Bruel.
Je faisait avec ma 4L le tour de France des librairies pour enfant, pour faire découvrir au monde mon premier bébé éprouvette. Le succès d’estime (2 000 exemplaires) qu’a rencontré ce livre m’a permis de rentrer dans mes fond (sans me faire vivre pendant 1 an de travail) et de penser à de nouveaux projets.

Et maintenant ?
Depuis qu’avec l’aide d’Hervé Marly j’ai tenté le pari d’adapter Mafia et de faire les Loups-Garous de Thiercelieux et grâce au succès commercial miraculeux ( près de 70 000 exemplaires vendus à ce jour dans quatre langues ), la micro-société est devenue une petite entreprise qui peut rêver à d’autres projets.

Et dans l'avenir, comment vois-tu Lui-Même ?
Rester lui-même et garder la tête froide !
Plus sérieusement, d’autres de mes jeux que j’aime bien sont dans les placards et d’autres auteurs et illustrateurs me tentent, y compris des étrangers.
Après le succès de Comme des mouches j’ai osé sortir un jeu plus cher à fabriquer Shazamm dont le démarrage est bon, mais il faut attendre quelques mois pour savoir quels rêves je pourrais me permettre.
Quoiqu’il en soit , je souhaite que Lui-même reste une petite structure sans salarié, réinvestissant ses gains éventuels dans de nouvelles créations ou adaptations, sans aller trop vite !
Je veux garder le temps de vivre et de jouer !

En étant ton propre éditeur, tu peux publier les jeux que tu as imaginé. N'est ce pas un peu risqué. Je veux dire, n'y a-t-il pas un risque d'autosatisfaction qui te pousse à sortir un jeu qui ne plaira pas forcément ?
C’est l’inverse, on devient schizophrène à mélanger les casquettes : l’auteur demande plus de matos à l’éditeur et l’éditeur met en doute les qualités de l’auteur. Je demande énormément (peu-être même trop !) de conseils, de reproches éventuels et d’avis honnêtes à mes proches comparses et aux gens du milieu : distributeur, boutiques, testeurs et chroniqueurs voir d’autres auteurs.
D’ailleurs je continue à faire des jeux pour d’autres éditeurs( très probablement un nouveau jeu chez Asmodée fin 2004) pour garder ce rapport de dialogue. C’est agréable que quelqu’un d’autre ose mettre de l’argent sur une de vos créations, c’est super de lui demander l’impossible et de le laisser se gratter la tête à son tour, en faisant la moue !

Et donc, comment sais-tu quel jeu peut être édité ?
Personne ne sait !
A un moment , tu y crois tellement fort que tu ne peux plus dormir (même si la peur vient souvent te faire douter). Dans ce domaine de création non subventionné, on doit être à la fois bon et vendable (comme la B.D à ses débuts), et donc on marche sur un fil invisible au dessus du vide.
Mais très souvent c’est une décision irrationnelle qui l’emporte, et le temps fait son œuvre de filtre (Comme des Mouches était complètement fini artistiquement et graphiquement un an et demi avant sa sortie).

J'imagine qu'il y a des jeux qui sont finalement restés à l'état de protos, ils sont nombreux ? Tu peux nous en parler un petit peu ?
Une bonne cinquantaine !
Certains remontent à la surface, d’autre s’enterrent et d’autres meurent en engendrant des enfants plus adaptés qu’eux ( C’est le cas du vieux jeu père de La guerre des moutons, 22 ans avant de donner naissance à l’ovin).

Comment deviner quelle quantité produire pour un nouveau jeu ?
Le minimum de quantité pour obtenir un prix raisonnable (souvent autour de 3 000, c’est déjà énorme et merveilleux de convaincre 3 000 fois une nouvelle personne de faire confiance à un jeu en le payant ).
Mais Shazamm était tellement cher à fabriquer que j’ai pris le risque d’en faire 5 000 pour faire baisser le prix public (c’est beaucoup trop pour un jeu à deux mais je voulais tellement qu’il sorte que j’ai pris le risque, merci les Loups-Garous de l’avoir permis).

Enfin, quand tu lances un nouveau jeu, tu estimes à combien de temps pour qu'il soit rentable ?
Impossible de savoir, de trois mois à cinq ans, ou jamais !

Tu peux nous donner quelques chiffres sur tes jeux ?
C’est déjà fait en partie.
Un exemple : Shazamm en fabrication et illustration etc. à coûté 30 000 Euros, il faut que le jeu se vende à plus de 4 000 ex. pour retrouver la mise de fond (c’est timbré je sais mais la prise de risque est un jeu, et la vie est courte !).

Pour l'instant, tu n'as édité que tes propres jeux. Verra-t-on d'autres auteurs édités chez Lui-Même un jour ?
Très probablement bientôt. Je rappelle quand même que deux des jeux ont des co-auteurs.

Des projets de nouveaux jeux ? Pour 2004 ?
Oui, un ou deux.

Tu étais présent à Essen et sur d'autres salons, qu'apportent-ils à une entreprise comme la tienne ?
Avoir un stand non, mais traîner dans les allées du salon de Paris, Nüremberg et Essen est indispensable.
Par ailleurs je mets un point d’honneur à honorer le maximum de festivals et de conventions de joueurs dans la mesure de mes disponibilités.

2003 semble avoir été une bonne année pour le monde du jeu (entre autre en France), que penses-tu justement de ce marché ?
C’est très bien … Mais je trouve quand même que ça s’emballe un peu, plus de cent jeux français nouveaux en 2003. Probablement près de cent cinquante en 2004.
Il y aura des morts et certains devraient trier un peu les projets, il ne faudrait pas tomber dans une récession à l’Allemande !

Et la tendance actuelle te semble plutôt positive ?
Oui surtout que certains signes montrent que le jeu de société revient à la mode dans les nouvelles générations.

Et dans cinq ans ?
On rêve d’un développement comparable à la B.D, mais ma modeste expérience m’a habitué plutôt à des cycles forts et d’autres moins.

Enfin, tu as un petit site internet pour présenter tes jeux. Quel est ton retour d'expérience là-dessus ?
C’est une belle petite goutte d’eau dans l’océan ( un millier de visite le premier mois), il ne faut pas pour autant négliger le contact physique (sic !) direct avec les joueurs.

Penses-tu qu'Internet soit indispensable pour se faire connaître ?
C’est le minimum aujourd’hui.

Tu proposes même tes jeux à la vente, voire même à des tarifs avantageux si on achète des lots. Cela représente beaucoup de ventes ?
3 pour 1 000.
C’est juste un service pour ceux qui ne pourraient pas trouver autrement.
Je préfère que le maximum de gens aillent dans les magasins spécialisés, qui sont la seule clé d’un succès à long terme pour notre petit milieu prometteur.

Un dernier mot pour la fin ?
Je souhaite que tous ceux qui s’investissent à fond dans leurs passions en tirent le maximum de plaisir et de sérénité ( ploumf !).

 

Interview réalisée par mail en janvier 2004

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