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Questions à
Henri Balczesack - Descartes |
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Henri Balczesack est directeur de collection pour Descartes-Eurogames,
l'éditeur de jeux "historique" qui est présent
depuis plus de vingt-cinq ans dans le monde du jeu.
L'interview s'est déroulée par téléphone.
Sur les quarante minutes qu'a duré l'interview, mon répondeur
qui était chargé de l'enregistrer n'en a retenu que
les trois premières... :-( L'essentiel de l'interview ne
sont donc pas les propos exacts d'Henri mais une simple retranscription
selon les idées principales dont je me souviens.
Bonjour Henri. Pouvez-vous vous présenter rapidement
?
Ca fait maintenant 21 ans que j’exerce cette fonction
pour Jeux Descartes. A l’origine j’ai
été sollicité essentiellement pour le lancement
d'une collection de jeux de rôle et j'ai organisé la
traduction de l’Appel de Cthulhu. Et je me
suis également occupé du développement des
jeux de stratégie, wargames. Quand les jeux de rôle
ont trouvé leur limite, à ce moment là, on
a pensé qu’il fallait qu’on accorde une plus
large place aux jeux de société. Duccio Vitale
a alors été nommé Directeur de collection,
et il est resté quelques années. Puis quand il est
parti, j’ai été chargé de reprendre sa
fonction.
En 2002, vous avez lancé la collection Games for
2, avec trois jeux de Bruno Cathala. Qu'est ce qui vous y a amené
? Les jeux à deux semblaient être un marché
d'avenir ?
Oui. C’est à dire que quand nous avons décidé
de se lancer dans les jeux de société, nous avons
décidé de sonder tous les marchés, donc nous
connaissions traditionnellement le marché des jeux de simulation
et de stratégie. Nous avons donc lancé plusieurs nouvelles
gammes : des jeux plus familliaux, les Blue Games
et les Games for 2, en plus des jeux de stratégie
que nous avions déjà.
Les collections aident les joueurs à s'y retrouver. S'ils
ont aimé un jeu dans la collection des Blue Games,
ils vont y revenir car les jeux sont dans le même esprit.
Nous avions également fait le choix de lancer des auteurs.
Nous voulions qu'en plus de la collection il y ait une reconnaissance
des auteurs, que les gens se disent "Tiens, le dernier Cathala
est sorti" ou "le dernier Faidutti". C'est déjà
ce qui se produit avec les auteurs en Allemagne. Nous avons, entre
autres, lancé Bruno Cathala, et puis nous
avons également relancé Bruno Faidutti.
Pour la gamme des jeux à deux, nous savions qu'il y avait
une demande, les gens cherchaient des jeux pour deux exclusivement,
pas pour deux à quatre et présentant un intérêt
limité à deux. Ensuite, il existait déjà
ce genre de collection en Allemagne. Nous voulions surtout quelque
chose qui ressemble vraiment à un jeu, avec un plateau, des
pions, des cartes, pas simplement des jeux abstraits. Et les jeux
de Bruno rentraient tout à fait dans cette catégorie.
Et
à l'heure actuelle, le bilan est-il positif ?
Il est tès positif.
Fin mars sortira enfin Atlas & Zeux, pourquoi aura-t-il
fallu attendre si longtemps pour voir un quatrième jeu dans
cette collection ?
Il a fallu attendre que le marché intègre
les jeux déjà sortis. Il n’est pas non plus
possible de sortir de nombreux jeux en même temps. Il faut
donc faire des choix, et certains jeux doivent attendre plus que
d'autres pour être édités.
Qu'est devenu Saqqarah, le jeu de Serge Laget et Bruno
Cathala ?
Pour ces mêmes raisons, Saqqarah a dû
être mis de côté pour laisser la place à
d'autres projets.
Pour l'instant, on y trouve seulement des jeux de Bruno
Cathala. Est-ce le seul auteur qui corresponde à la ligne
éditoriale que vous vous êtes fixé ?
Non, nous avons prévu des jeux d'autres auteurs. Nous souhaitons
lancer d'autres auteurs maintenant.
D'ailleurs, comment choisissez-vous les jeux à
éditer ?
J'habite dans une maison, dans un village, et ici tout le monde
a des jeux. Je joue avec tout type de public, des étudiants,
des retraités, des familles, ce qui me permet de me faire
un avis général. Ensuite bien sûr je rejoue
avec ma "garde rapprochée", et là, on commence
à décortiquer le jeu, le système...
Pour vous donner une idée, j'ai examiné, je crois,
cent quatre-vingt-deux jeux en 2002, pour n'en retenir que trois
ou quatre. Et encore, il y avait déjà eu une sélection
en amont selon mes critères.
Il
y a quelques jours est sorti Tyrus, dans la même collection
que Phoenix. Ce sont aussi des jeux pour deux joueurs, mais ils
ne font pas partie des Games for 2, pourquoi ?
Il y a une question de matériel.Nous voulions sortir
une belle édition pour Tyrus.
Et ce n'était pas possible dans la collection des Games
for 2.
Phoenix et Tyrus
sont aussi plus abstraits et ne sont pas tout à fait destiné
au même public. Ils sont édités en 4 langues
(français, anglais, allemand et espagnol).
Quand on regarde votre catalogue, la plupart des jeux
ont été primés à des concours. C'est
un choix de votre part, le fait que le jeu est gagné un concours
vous semble plus vendeur ? Ou bien est-ce parce que vous pensez
que les jeux primés méritent d'être édités
?
En général, nous les avions repérés
ou retenus avant qu’ils soient primés. Ce qui est normal
quand il s’agit de bons jeux.
Mais il est vrai également que le fait que le jeu soit primé
est plus vendeur. C’est une reconnaissance qui n’est
pas négligeable.
Quelles sont vos impressions sur le marché actuel
?
Le marché actuel semble
un peu s'emballer, il ne faudrait pas que l'on produise du jetable.
Nous ne cèderons pas à la tentation de faire du volume
en produisant à tout-va des jeux gentiment standard. Notre
objectif est de susciter et soutenir une création originale
dans laquelle les vrais passionnés pourront se retrouver.
C'est la qualité qui est essentielle à nos yeux, tant
au plan ludique que matériel. Et même si cela implique
une prise de risque, il importe que la parution d'une de nos nouveautés
soit perçue comme un événement, pas comme la
publication d'un simple jeu de plus à notre collection. De
toute façon, si nous voulons participer au développement
de ce marché, nous avons tout intérêt à
démontrer à ceux qui découvrent que le jeu
de société a beaucoup progressé qu'il y a désormais
de nombreuses manières passionnantes de jouer.
Pour ma part, je considère qu'il existe une bonne ambiance
dans le monde ludique, et c'est tant mieux. Il y a une bonne entente
même entre concurrents, car le marché est tellement
petit qu'on ne se gêne pas vraiment. Au contraire, si mon
concurrent amène de nouveaux joueurs, c'est tant mieux pour
nous aussi.
Enfin, une question plus personnelle : vous jouez régulièrement
?
C'est
une vieille passion. Quand Sciences & Vie a
publié son hors-série en 1978 sur les jeux de société,
j'étais déjà passionné et je possédais
une belle collection. Lorsque Jeux Descartes a
été créée et a proposé des jeux
par correspondance, j'ai immédiatement été
souscripteur du Club Jeu Descartes et j'en ai été
le 3ème membre français. J'ai encore ma carte de membre
sur mon bureau...
Aujourd'hui, je joue toujours souvent avec ma famille, mes amis,
mes voisins et mes "spécialistes". Pour tester
des jeux, bien sûr, mais aussi pour passer un bon moment.
Par exemple, j'ai des amis "pointus" qui viennent le week-end
prochain. Et ils espèrent bien que , du vendredi soir au
dimanche, nous allons jouer. J'ai préparé une sélection
et nous allons jouer non-stop, à des jeux classiques et expérimentaux,
en immersion aussi totale que possible. Un véritable boulot
! Mais, quel plaisir aussi. En dehors de ce genre de week-end intensif,
je joue aussi, dès que l'occasion s'en présente, avec
tous ceux qui viennent me voir. Je suis aussi souvent invité,
en tant que représentant de jeux Descartes à faire
découvrir les nouveaux jeux de société à
divers clubs du coin.
Interview réalisée par téléphone
en mars 2004